Dany,
Tu étais mon plus vieil ami. Soixante six années de compagnonnage, parfois en pointillé comme les nécessités de la vie l'imposent, mais sans que jamais le lien ne se dénoue. L'école primaire, la vie dans le quartier quand la rue était encore un espace de jeu, le lycée, le club de natation, autant de lieux où s'approfondissait, se complexifiait et se consolidait une relation jusqu'à devenir durable. Après la parenthèse réunionnaise de la famille nous serons tous happés par les études, puis par l'installation dans la vie professionnelle et familiale, mais les dispersions ne résisteront jamais au rappel de Perpignan.
Ta rencontre avec Hélène a été la grande affaire de ta vie: elle s'est imposée comme centre de gravité d'un cercle qui est allé s'agrandissant, agrégeant la belle famille, réorientant ta vie professionnelle et constituant une véritable tribu vivifiante et joyeuse où l'on savait ce que festoyer voulait dire.
Bien sûr vous n'avez pas été épargnés par les vicissitudes de la vie, mais elles sont au final comme les rides d'un visage, les stigmates du bonheur et des difficultés.
Dany, ces dernières années tu as porté comme un fardeau trop lourd la disparition d'Hélène. La solitude t'a rongé et sa morsure t'a été insupportable entrainant maladies et addiction. Quelques jours avant ton départ nous avons eu une conversation téléphonique dans laquelle tu me confiait ta joie de voir Cécile et sa famille te rejoindre au mas. Le plaisir n'a pas duré. Mais je suis sûr que tu aspirais depuis longtemps à rejoindre celle qui avait été le soleil de ta vie. Te voilà exaucé.
On dit parfois que l'on est vraiment mort que quand on a disparu de la mémoire de ceux qui nous ont aimé. Alors, Dany, tu est encore vivant pour un bon bout de temps.
Jean IGUAL aussi accompagné de son Hélène.